TERRAIN D'ASILE

L'Italie est en première ligne dans la crise des migrants. Au coeur du Piémont, le club de rugby de Casale Monferratoles accueille à bras ouvert." 

Attitude Rugby N°69 – ETE 2017
Texte : Mathieu Ropitault

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« A mi-chemin entre Milan et Turin, la ville piémontaise de Casale Monferrato était jusqu'à aujourd'hui plus connu pour son procès contre la multinationale de l'amiante Eternit et ses 1800 morts imputés au matériau toxique, que part son modeste club de rugby "Tre Rose Rugby" ».
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«Sous l'impulsion de son président Paolo Pensa, Le Tre Rose Rugby est un précurseur. Le XV casalais est le premier club de rugby à accepter des demandeurs d'asile de l'autre côté des Alpes. Une révolution en pleine crise migratoire ».
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« Ibrahim n'avait jamais entendu parler de Casale Monferrato avant 2015. A 23 ans et des milliers de kilometres au compteur, l'ivoirien découvre le rugby à son arrivée ici. Cela represente aujourd'hui pour lui "beaucoup d'espérance et une bonne raison de se lever le matin" ».
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« Quatre fois par semaine, Paolo utilise le minibus du club pour récuperer les migrants dans les bourgades aux alentours. "En janvier le minibus a aussi été vandalisé. Grâce à une cagnotte organisée par une école et au soutien de la mairie, nous avons pu le remplacer. Je préfère retenir ces élans de générosité plutôt que le négatif" ».
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«La création d'une deuxieme équipe avec l'arrivée de vingt joueurs en avril dernier prouve que nous avons fait le bon choix. Il y a de l'émulation, on crée du lien social. Les demandeurs d'asile s'impliquent et se sentent valorisés. »
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«Pour Youssuf, Malien de 25 ans et etranger aux passes vrillées avant d'accoster sur la péninsule en 2015, "Une chose est sûre : le rugby fait maintenant partie de ma vie" ».
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«Pour Titti Palazzetti, maire de Casale Monferrato : "Les migrants sont une richesse et il est de notre devoir de faciliter leur intégration. Notre ville était jusqu'alors internationalement connue pour le scandale de l'amiante. Aujourd'hui le Tre Rose RUgby est une bénédiction, il redore notre blason. ».
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« Fin de saison oblige, l'entrainement habituel a pris l'allure d'un match amical. De la cahute des remplacants parvient un mélange improbable d'italien, d'anglais, de français et de dialectes africains. une vraie rencontre internationale ».
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«La deuxième équipe est composé à 100% d'asiles fraîchement débarqués. Les bizuts ont le privilège des tuniques de la Squadra Azzura, celle de Sergio Parisse, pas Gianluigi Buffon. Précision pas si inutile pour des néophytes qui n'avaient jamais taquiné autre chose qu'un ballon rond il y a tout juste deux mois...  ».
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« L'equipe est aujourd'hui quasi exclusivement composée de demandeurs d'asile. Fabio, le capitaine, n'a pas abandonné le navire. "Les débuts n'ont pas été faciles, ils ne parlaient pas italien et ne comprenaient rien aux règles de jeu. Mais le projet m'a convaincu et des liens se sont tissés. C'est avant tout une incroyable aventure humaine" ».
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« "Une! Due! Tre! Rose!" Le cri est repris en choeur sur la pelouse du Campo Ronzone. A priori pas encore assez fort pour susciter l'attention des joggeurs et autres promeneurs de chiens qui se disputent la bande d'asphalte enlaçant le terrain de rugby ». 
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« "Le règlement stipule que 21 des 22 joueurs convoqués sur une feuille de match doivent être issus de la formation italienne. Tout joueur n'ayant jamais été licencié dans son pays est considéré comme tel et c'est le cas de nos demandeurs d'asile. Mais cela est compliqué à prouver puisque certaines fédérations africaines ne m'ont à ce jour jamais répondu..." explique le président ».
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«... En contrepartie des dérogations obtenues de la Fédération italienne de rugby, il faut tirer un trait sur une promotion en division supérieur dans le cas où le club remporterait le championnat ».
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« Aprés chaque entrainement, toute l'equipe se retrouve au bar du coin où le club leur sert un repas et où ile peuvent se reunir et jouer au Baby foot.
On oublie nos problémes avec le rugby, on ne pense plus à nos papiers et aux démarches administratives. Les gens ont tendance à nous regarder de haut et ce n'est plus pareil sur le terrain. Là, on relève la tête"  ».
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« Le Campo Ronzone est le lieu de tous les possibles».
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« Les plaquages tiennent lieu d'échappatoire. Un moyen de combler l'attente dans l'espoir d'un titre de séjour en bonne et due forme».
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«Pour Paolo Pensa, le président de Tre Rose Rugby, rêve "que les demandeurs d'asile puissent jouer là où ils le veulent". Le bienfaiteur a déjà franchi un cap : des clubs italiens se sont rapprochés de lui pour reproduire l'initiative solidaire ».
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